POSTED ON OCTOBER 12, 2019
En quatre films, la réalisatrice italienne Lina Wertmüller voit l’Italie à travers les yeux d’un petit homme.
Giancarlo Giannini
Il faut avoir une sacrée intelligence pour aveuglément s’abandonner sous la direction de Lina Wertmüller. Le comédien italien Giancarlo Giannini la possède. Il devient son acteur fétiche. Giannini, qui n’a pas peur du pire de ce que peut représenter l’âme humaine, endosse les rôles de l’homme de taille moyenne, merveilleusement veule, violent, jamais responsable et terriblement vivant. Il se transforme en une sorte de Charlie Chaplin, en mode Charlot, qui aurait muté vers un inaltérable ridicule avec sa moustache faussement virile, ses yeux tantôt mi-clos quand il croit dominer, tantôt écarquillés quand il s’apprête à fuir. Avec ce personnage de petit macho implorant, Wertmüller sublime l’imbécilité de l’individualisme à travers quatre films : Mimi métallo blessé dans son honneur (1972), Film d’amour et d’anarchie (1973), Vers un destin insolite sur les flots bleus de l’été (1974) et Pasqualino (1975).
Face à lui : les italiens !
Plus que l’Italie, Wertmüller ausculte les italiens. Mimi, le petit ouvrier, Antonio l’anarchiste réfugié dans un bordel, Gennarino skipper communiste, et Pasqualino, voyou minable, sont tous d’origines modestes. Parce qu’ils ne sont rien aux yeux de la société, ils se confrontent à une Italie aux classes sociales marquées par le communisme fier, la mafia épaisse, et la bourgeoisie arrogante. A la fois dérisoires et conséquents, les italiens qui font face aux héros très susceptibles des films de Wertmüller, réagissent tels des personnages de bande dessinée. La caméra sophistiquée de la cinéaste les déforme, les approche de très près pour en soulever une trivialité désarmante qui les rend tous inoubliables.
Virginie Apiou